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Intervention au cours de l'examen du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Première séance du jeudi 1er juillet 2010
Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Modernisation de l’agriculture et de la pêche
Article 1er
M. le président. La parole est à M. Philippe Gosselin, premier orateur inscrit sur l’article.
M. Philippe Gosselin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, élu d’un département rural, la Manche, dont le PIB doit beaucoup à l’agriculture et l’agroalimentaire grâce à sa production laitière – la deuxième de France – sa spécialisation dans la culture des carottes et son ostréiculture, je me réjouis du titre Ier de ce projet de loi qui vise à définir et mettre en œuvre une politique publique de l'alimentation.
Rappeler ainsi l'objectif nourricier de l'agriculture permet de prendre la mesure du rôle des agriculteurs dans notre société. C’est aussi reconnaître tout ce qu’on leur doit depuis au moins soixante ans en France et en Europe. Nous étions dépendants, nous importions massivement et notre agriculture est devenue conquérante grâce aux agriculteurs qui ont su s’adapter.
Élaborer une véritable politique publique de l'alimentation, c'est faire le choix de la qualité – ce qui répond en partie aux arguments de nos collègues – et de la sécurité sanitaire. C'est un enjeu majeur de santé publique. De nombreux problèmes de santé, telles les maladies cardiovasculaires ou l'obésité, prennent en effet leur source dans une alimentation déséquilibrée et de mauvaise qualité. Les citoyens doivent donc pouvoir bénéficier d'une éducation nutritionnelle dès leur plus jeune âge et, les consommateurs, d'une information claire sur les produits qu'il achète, leur contenu et leur origine.
C’est également faire le choix de la souveraineté alimentaire. La France, pays agricole par excellence, renommé pour sa gastronomie, ne peut laisser entrer librement sur son territoire des produits qui ne respecteraient pas les normes environnementales et sanitaires qui sont imposées à ses agriculteurs. Il ne s'agit pas là de prôner le protectionnisme mais simplement d'exiger des échanges commerciaux équitables et justes.
Sans promouvoir une agriculture par trop intensive et industrielle, nous devons permettre aux agriculteurs français de s’adapter à la concurrence en produisant en quantité suffisante, dans le respect de l'environnement bien évidemment.
Cette politique publique de l'alimentation doit mettre en valeur le talent des hommes et des femmes qui cultivent la terre. Elle doit leur permettre de vivre, oui, vivre de leur métier. Or, nous l’avons dit et redit depuis des mois et des mois et vous le rappelez constamment, monsieur le ministre, les prix des produits agricoles, qu'il s'agisse de la viande, du lait ou des légumes, sont très bas et ne couvrent pas les charges des exploitants. Les revenus agricoles ont ainsi subi une baisse de 34 % en 2009. La crise que traverse l'agriculture française est une crise profonde. C'est celle d'un modèle qui ne satisfait plus ni les agriculteurs, ni les consommateurs. On ne peut accepter que les denrées alimentaires fassent l'objet d’une certaine forme de spéculation au détriment de ceux qui les produisent et qui sont injustement rémunérés.
Rappelons les prises de marge dans la distribution, qui se sont beaucoup développées, ou dans l’industrie, où l’on observe de grands déséquilibres avec des effets de ciseau. Sur ce point, j’estime que la loi de modernisation de l’économie n’a pas porté tous ses fruits, loin s’en faut.
M. Philippe Folliot. C’est vrai !
M. William Dumas. Nous vous l’avions dit !
M. Philippe Gosselin. Il faut que la loi de modernisation de l’agriculture en corrige les effets les plus pervers et c’est ce qu’elle tente de faire. Dans ce contexte, l’observatoire des prix et des marges doit, à l’évidence, être renforcé. Vous avez tenté de le faire, monsieur le ministre, et nous vous soutiendrons. Le coefficient multiplicateur est à mettre en avant alors même que les services de Bercy freinent parfois des quatre fers.
Dans l’Europe naissante, dans les années qui ont suivi la reconstruction, nous avons fait des choix, choix d’une agriculture performante mais familiale, choix d’une politique agricole commune. C’était ce qu’il fallait faire.
Il y a au moins deux niveaux de réponse à la crise actuelle, sans parler de l’OMC même si je regrette personnellement que l’agriculture ait été intégrée dans ses négociations : l’Europe et la France.
S’agissant de l’Europe, grâce à l’action dynamique et courageuse – et je le dis avec beaucoup de satisfaction – de notre ministre de l’agriculture, que sa fine connaissance des arcanes de l’Europe rend crédible, notre grand isolement a pris fin. Je salue notamment la déclaration de Paris du 19 décembre 2009 et tout le travail qui en découle. La France est de retour dans l’Europe agricole, la France n’est plus seule. Certes, nous devons encore progresser, agréger d’autres pays et travailler mais nous avançons.
Prenons garde cependant aux distorsions de concurrence entre pays qui seraient dues à l’existence de normes différentes. Parfois trop exigeants, parfois plus royalistes que le roi, nous nous tirons, dirons-nous trivialement, une balle dans le pied. Cessons de fixer à l’échelon national des normes que l’Europe n’exige même pas de nous. Cessons de pousser notre brouette paperassière, cela a été dit par M. Le Fur et d’autres de nos collègues hier. Que dire encore d’une fiscalité différente ou de durées d’amortissement fort variables ?
Quant au plan national, sans être forcément la panacée, la réponse absolue à tous nos maux et difficultés, cette loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ouvre des opportunités. Parce qu’il n’y a pas une agriculture unique, la réponse ne peut être unique, et c’est bien la combinaison des différents niveaux, français, européens, qui permet d’avancer. En la matière, la contractualisation peut être une vraie chance si elle n’est pas la traduction d’une intégration forcée dont on a vu par ailleurs les limites. De même, l’assurance peut être un réel et très bon support, si toutefois l’État ne se désengage pas totalement du système des calamités agricoles, s’il continue à soutenir publiquement, le cas échéant, les productions et garde en tout cas une part active dans la prévention et, bien sûr, la gestion des crises sanitaires. Quand il le faut, la solidarité nationale doit s’exprimer. Une dose de régulation ne nuit pas, mais n’allons pas trop loin, gardons cette idée de régulation.
Il faut aussi se réjouir de la protection des terres agricoles, alors que, tous les dix ans, c’est un département français qui disparaît.
En conclusion, ce projet de loi et la politique publique de l’alimentation qui doit être élaborée doivent être l’occasion de rappeler l’importance de nos agriculteurs, ceux qui nous nourrissent, qui entretiennent, font vivre nos territoires ruraux. C’est le premier pas vers un nouveau système à la hauteur des enjeux qui ont été cités tout à l'heure : la souveraineté alimentaire qui est essentielle, la santé publique bien sûr, l’aménagement du territoire et le développement durable, sans oublier évidemment l’essentiel, à savoir que chaque agriculteur puisse vivre convenablement de son travail et regarder l’avenir avec sérénité. Je ne veux plus de ces agriculteurs qui ont honte de dire ce qu’ils font. J’ai honte moi-même quand ils n’arrivent plus à rémunérer leur travail et qu’ils ne rêvent que d’une chose : que leurs enfants ne prennent pas la relève.
Oui, l’agriculture a un avenir. Il faut nourrir la planète ; c’est le défi quantitatif. Les pays émergents comme l’Inde ou la Chine ont des besoins croissants, et c’est une chance ; c’est le défi qualitatif. Ils représentent l’équivalent de notre marché intérieur européen, avec une classe moyenne qui consomme de plus en plus. Il y a plus que des espoirs, il y a des marchés. Ce texte, monsieur le ministre, suscite beaucoup d’espoirs. Faisons en sorte de ne pas les décevoir.
Je n’aurai sans doute pas le lyrisme dont a fait preuve, hier soir, Jean Lassalle. Mais sachez, chers agriculteurs, qu’on vous aime et que le pays a vraiment besoin de vous !
Permanence de Philippe Gosselin à Percy
Philippe Gosselin s'est rendu ce matin à Percy afin d'aller à la rencontre des citoyens et des maires du canton. L'échange avec les maires a tout d'abord concerné le projet de ligne THT Cotentin Maine, la déclaration d'utilité publique ayant été signée vendredi 25 juin dernier. Philippe Gosselin a ainsi pu évoqué le dispositif sanitaire que le Gouvernement propose de mettre en place de manière individualisée auprès de tous les citoyens qui le solliciteront. Ces mesures, bien qu'inédites et ambitieuses, ne satisfont malheureusement pas tous les élus. La réforme des collectivités territoriales a également été abordée et tout particulièrement le regroupement des communautés de communes. Quelle méthode sera retenue ? Quel périmètre ? La situation démographique du département, et son impact sur le nombre d'élèves scolarisés, suscite également l'inquiétude des maires du canton qui craignent pour l'avenir de leurs écoles.